Accompagnement de la fin de vie et entraide
Lorsqu’un proche est atteint d’une maladie grave ou que ses jours sont comptés, le passage de fin de vie par les soins palliatifs se révèle être une étape importante du processus de deuil. On le sait bien; vécue de manière apaisée, la façon dont sont abordés les derniers moments aux cotés d’un proche peut avoir des conséquences déterminantes sur le bon déroulement du processus de deuil.
L’accompagnement de ces derniers instants de vie est pour beaucoup sacré, mais non moins éprouvant pour l’entourage du malade, qui en sort bien souvent épuisé au moment de commencer son chemin de deuil. Cette période charnière intense en émotions est très particulière. Elle réveille en nous, de nombreuses questions et l’instant des adieux reste à jamais gravé dans notre mémoire.
C’est parce que ce moment est si spécial dans la vie des proches survivants que nous sommes allés à la rencontre de Marion, créatrice de l’Envolée d’or, association d’accompagnement en soins palliatifs.
Bonjour Marion, pouvez-vous vous présenter aux lecteurs des mots du deuil ?
Bonjour, je m’appelle Marion, je suis aide-soignante depuis 14 ans, et j’ai toujours voulu travailler dans le milieu médical. Très rapidement, je me suis intéressée aux soins palliatifs mais le déclic s’est réellement produit après le décès de mon grand-père maternel. Cette épreuve m’a donné l’idée de mettre en place un projet pour accompagner les familles qui traversent cette épreuve.
Quelle a été votre motivation pour devenir bénévole ?
Transmettre des informations, partager des documents, expliquer ce que sont les soins palliatifs. Quand on est dans la douleur, on ne pense pas à tout cela. Voilà pourquoi avec l’équipe nous avons voulu lancer l’association via un site internet, puis sur Facebook, pour qu’il y ait un échange entre les personnes ayant vécu la même situation. Pour certains, il est plus facile de parler derrière un écran.
Pouvez-vous nous parler de votre association, ses missions, ses actions, ce qu’elle propose et à destination de quel public ?
L’association est là pour accompagner, écouter et soutenir les aidants depuis l’annonce de la maladie d’un proche jusqu’à la fin.
Sur internet nous proposons un forum, semblable au forum d’entraide deuil et des articles pour inciter les personnes à parler de ce qu’elles ressentent. Le groupe Facebook est un forum géant où tout le monde peut venir parler ouvertement sans avoir peur d’être jugé. Ce groupe agit comme une chaîne humaine où chacun, de sa propre expérience, apporte un soutien pour soulager la peine de l’autre.
Nous pouvons également répondre par lettre ou par téléphone aux questions. Dans le cas où nous ne sommes pas en mesure d’y répondre, nous les dirigeons vers d’autres associations spécialisées. Nous réfléchissons à des actions sur le terrain pour les aidants.
–> Le site internet de l’association l’Envolée d’or
–> Le groupe d’entraide de l’association sur Facebook
Pouvez-vous nous faire part de votre expérience et votre parcours dans votre association, ce que vous faites auprès des endeuillés ?
Je trouve que les personnes ont un besoin énorme de parler, et cela de plus en plus. Elles ont besoin de chaleur humaine, c’est ce que je ressens à chaque fois sur le groupe. Parler de la mort est difficile, on a l’impression que tout nous tombe sur la tête et qu’on est seul à vivre cela, alors que non… Puis il ne faut pas forcer les gens à parler. Cela vient doucement, c’est comme pour le processus de deuil, il faut y aller étape par étape.
Nous les accompagnons beaucoup sur le forum où elles viennent poser leurs questions. Il nous arrive même de suivre certaines familles sur de longues périodes par messagerie privée pour garder l’anonymat.
Accompagner c’est dire « si vous avez besoin de parler, je suis là »
Pourquoi avez-vous choisi ce type d’actions ?
Pourquoi internet ? Avant de faire le site et l’association, j’avais mis en place une page Facebook sur les soins palliatifs, voyant l’ampleur que cela prenait avec toutes ces demandes d’aide et ces nombreux messages, nous avons décidé de créer l’association. Nous voulons conserver une dimension humaine.
Que vous apporte humainement d’aider les autres, de les accompagner ?
Transmettre, être à l’écoute des autres sur ce sujet qui n’est pas simple. La mort a longtemps été taboue. Humainement cela me procure de la joie de pouvoir apporter ne serait-ce qu’un sourire à quelqu’un, ou une écoute bienveillante. Accompagner, c’est dire « si vous avez besoin de parler, je suis là ». Laisser comme une porte ouverte, prendre son temps…
« Je dis souvent aussi qu’il faut vivre au fur et à mesure et prendre le temps de profiter de la personne malade tant qu’il est encore possible »
Pourquoi est-il important de se faire accompagner selon vous ?
Je pense que c’est important pour ne pas perdre pied, pour ne pas se laisser submerger par les évènements. Être aidant est difficile tous les jours et les personnes qui se retrouvent dans cette situation prennent tout sur leurs épaules parce que « c’est comme ça » comme elles disent. « C’est mon père ou ma mère et je lui ai promis qu’il partirait chez lui… ». J’ai été la première a le dire, mais accepter de l’aide permet de souffler un peu pour soi et d’accompagner son proche d’une autre manière.
Je parle souvent de sommeil aux familles qui accompagnent leur proche, car au fur et à mesure l’aidant peut se perdre. Préserver ses forces permet d’être plus lucide et de mieux prendre compte la situation. Ce temps de repos n’empêche pas du tout la relation forte avec la personne, au contraire cela permet plus de confort pour l’autre. Après il ne faut jamais forcer la main, il y a des personnes qui donneront tout jusqu’à l’épuisement pour la personne malade et d’autres qui d’eux-mêmes demanderont de l’aide naturellement.
C’est pour cela que chaque situation est différente, et nous avons tous notre idée sur la question. Je dis souvent aussi qu’il faut vivre au fur et à mesure et prendre le temps de profiter de la personne malade tant qu’il est encore possible. Chacun a sa propre définition du mot « accompagner » : certains accompagnent par amour et d’autres par devoir..
Qu’avez-vous envie de dire à une personne qui accompagne un proche en fin de vie ? Un conseil ou un mot ?
J’ai envie de lui dire que si elle veut parler ou avoir des conseils je suis là, qu’elle n’est pas seule. Lui dire qu’il faut prendre son temps, que, comme pour un deuil, nous traversons plusieurs étapes, mais aussi que sa douleur et ses pleurs sont normaux et libérateurs. Enfin, si l’accompagnant est amené a vivre la perte de son proche, je ne dis jamais « bon courage » car à ce moment là nous n’en avons pas. Je présente simplement « mes condoléances.. »
Un petit mot pour finir ? Dans « accompagner » nous entendons « Aider » et dans « Aider » nous entendons « Aimer »….
Un grand merci Marion, nous sommes de tout cœur avec vous.