Métaphore de la bléssure dont on peut aider le processus naturel grace à des soins.
Le deuil : un processus naturel de cicatrisation[/highlight]
Pour comprendre le sens véritable du processus de deuil, prenons une image…
Imaginez que vous êtes dans votre cuisine, en train de préparer un plat de frites. Vous avez déposé sur le feu un récipient rempli d’huile. Soudain, c’est l’accident : mal posé sur la plaque chauffante, le récipient bascule et son contenu se déverse sur votre main, en vous brûlant gravement ! C’est un traumatisme grave.Deux possibilités s’ouvrent à vous :
1. Vous décidez d’étouffer la douleur
Vous prenez des médicaments contre la douleur et vous enveloppez votre main dans un pansement, « jusqu’à ce que ça passe »… Vous vous dîtes qu’avec le temps, les choses vont s’arranger d’elles-mêmes. Vous avez d’autres priorités dans votre vie : construire votre maison, élever votre enfant, avancer dans votre carrière… et vous n’allez pas vous laisser paralyser par cet incident de parcours. Vous prenez donc la décision de ne pas vous occuper de votre blessure et de laisser faire.
Pourtant, même si vous ne la prenez pas en compte, la blessure n’en existe pas moins. Un processus naturel de cicatrisation va s’initier en vous, que vous le souhaitiez ou non. Votre main va spontanément commencer à se réparer… mais dans quelles conditions ? Les tissus vont se reconstruire tant bien que mal avec des adhérences cutanées, des rétractions tendineuses ; une infection peut même s’installer. Avec le temps, la cicatrice ne sera certainement pas de bonne qualité. Vous risquez de ne plus pouvoir utiliser votre main comme avant. Le fait de ne pas tenir compte de la blessure aujourd’hui risque d’influencer négativement votre avenir…
2. Une autre solution s’offre à vous : face à cette blessure soudaine, vous décidez d’accompagner activement le processus de cicatrisation
Cela signifie que vous vous donnez les moyens de soigner votre main, du mieux possible. Vous allez consulter un médecin. Il fait le bilan de vos lésions et il vous confie à une infirmière qui élabore avec vous un programme de soins. Jour après jour, pendant plusieurs semaines, elle enlève les pansements… ça fait mal ; elle nettoie la plaie… ça fait mal ; elle élimine soigneusement les peaux mortes pour favoriser la cicatrisation… ça fait mal ; elle applique diverses pommades antiseptiques pour prévenir l’infection… ça fait mal…
Oui : tous ces soins font mal, mais vous n’êtes pas tombé(e) sur une infirmière sadique ! Elle est simplement ancrée dans la conviction qu’en vous faisant ce mal là, aujourd’hui, elle va accompagner efficacement le processus de cicatrisation de votre main. De votre côté, vous acceptez la douleur de cet accompagnement médical car vous savez que ce mal est nécessaire, si vous voulez véritablement prendre soin de cette main mutilée. Grâce à l’attention soutenue que vous lui portez, au fil des mois, votre main va cicatriser dans de bonnes conditions. Même si elle portera toujours les cicatrices de la blessure initiale (il sera impossible de l’oublier), votre main sera à nouveau souple et fonctionnelle.
Qu’est-ce que cette image de la main brûlée vous apprend, alors que vous venez de perdre quelqu’un que vous aimez ?
Quand nous nous blessons physiquement, notre organisme a l’intelligence spontanée de mettre en route un processus de cicatrisation de la plaie physique. Ce processus naturel nous protège des agressions extérieures et répare les tissus lésés.
Il en va de même quand on perd quelqu’un qu’on aime : notre esprit a, lui aussi, une intelligence spontanée qui met en route un processus de cicatrisation de la plaie psychique que représente la perte de l’être aimé. C’est ce qu’on appelle le « processus de deuil » : ce processus est naturel et il nous est absolument nécessaire, si nous voulons restaurer notre équilibre intérieur et ne pas nous effondrer psychologiquement. C’est une protection qui nous permet de survivre au traumatisme violent de la disparition. Il faut bien comprendre que la mise en route du processus de deuil ne relève pas d’une décision de notre part : elle est inconsciente, automatique et immédiate après la perte de la personne aimée.
La question qui se pose alors, face à votre perte, est la même que face à la main brûlée : quelle décision allez-vous prendre pour accompagner le processus de cicatrisation du deuil ?
- Soit vous refusez de vous confronter à tout ce que cette perte induit en vous : des émotions très fortes, des changements de comportements, des modifications dans votre relation à autrui… etc. Vous espérez qu’avec le temps – et avec le temps seulement – le processus de deuil va se passer tout seul et que tout va progressivement rentrer dans l’ordre, « comme avant », sans avoir à changer quoi que ce soit dans votre vie… Cela peut marcher quelque temps, mais vous vous rendez compte très rapidement que ça ne fonctionne pas sur la durée et que vous êtes, en fait, de plus en plus mal…
- Soit vous décidez de faire face, directement et activement, à ce qui se passe maintenant dans votre vie. Le fait d’accepter la réalité de cet événement qui bouleverse votre existence ne va pas atténuer votre douleur, dans un premier temps (rappelez-vous : les soins de l’infirmière font mal pendant longtemps). Mais vous choisissez de faire quelque chose face à votre perte et vous décidez de prendre soin de vous, sans subir passivement les événements.
Cette démarche active de votre part et cette décision de vous occuper de vous est ce qu’on appelle : le « travail de deuil ». Le travail de deuil permet de canaliser la douleur et d’aller vers la guérison de la blessure intérieure : c’est l’équivalent du plan de soins que l’infirmière construit avec vous pour traiter votre main.
Il y a donc, d’un côté, le « processus de deuil » qui est spontané, naturel et indispensable et de l’autre, le « travail de deuil » qui est votre décision d’accompagner ce processus de deuil, du mieux possible. Ce sont deux notions différentes.
En lisant ceci, vous comprenez aussitôt que le processus de deuil n’a donc rien à voir avec l’oubli de la personne que vous avez perdue ! Sur le site de « Traverser le deuil », il ne sera jamais question d’ « oubli » ou de « tourner la page », car, en vérité, le deuil ne parle pas du tout de cela.
-Textes extrait de Traverserledeuil.com