Avant d’entrer plus avant dans notre exploration des rêves et des liens qu’ils révèlent entre les vivants et leurs morts, un rappel : dans la tradition chinoise, on parle sur un plan aussi bien médical que philosophique de l’énergie de l’éveil en distinguant la manière dont elle circule le jour et la nuit. Quand vous ouvrez les yeux le matin, votre énergie se tourne vers l’extérieur, vous allez vous dresser, poser les pieds sur le sol, entrer en contact avec des éléments extérieurs, pour vous laver, vous nourrir : vous êtes en contact avec le monde visible et tangible, et avec les autres êtres vivants.
Quand la nuit tombe
Quand la nuit tombe et que vous éteignez les lumières pour aller vous coucher, cette énergie ne disparaît pas, elle change de mode de circulation. Ce qui se mettait en mouvement vers l’extérieur va se tourner vers l’intérieur, ce qui se nourrissait des images et des informations du monde visible va s’intérioriser et susciter d’autres images et d’autres informations, moins objectives d’emblée mais tout aussi réelles pour la personne qui dort.
Cela est si fort que lorsque nos rêves sont très présents, qu’ils soient des cauchemars ou juste des sensations de grande réalité, il nous est difficile d’émerger de l’atmosphère du songe. La lumière est allumée, nous sommes dans notre chambre, mais la sensation d’intense proximité avec le rêve persiste. De même que nous pouvons nous souvenir avec persistance d’une chose vécue il y a longtemps, nous pouvons être sous l’influence de ce que nous avons rêvé alors que notre raison devrait pouvoir l’exclure ou le ramener a des proportions réalistes.
Les yeux sont les fenêtres de l’âme
Ce préambule pour rappeler que nous pouvons voir les rêves comme des moments du voyage nocturne de la conscience. Dans le courant de la journée, la conscience devient pensée et s’applique à des tâches plus objectives, et surtout mieux contrôlées par le mental, même si selon les personnes elles n’excluent pas l’imaginaire et l’intuition. Il est intéressant de constater que les yeux y occupent toujours une fonction essentielle, puisqu’ils sont engagés dans le fait de voir, le jour, et aussi l’activité du rêveur, dont le mouvements oculaires montre l’implication la nuit. Les yeux étant une partie du cerveau, celle qui, à fleur de tête, est la plus proche du monde extérieur, on comprend mieux en quoi, comme le dit le poète, « les yeux sont les fenêtres de l’âme ». À ces fenêtres, qu’elles soient ouvertes sur le monde intérieur ou sur le monde extérieur, c’est bien la conscience qui se promène et se rend visible.
Dans le processus du deuil l’un des aspects les plus difficiles est précisément de ne plus voir ce qu’on aime. Il nous faut pour le coup faire un effort d’imagination pour entrevoir (si l’on peut dire !) que cela n’implique pas forcément que nous ne soyons plus vus.
Prenons cette image : si vous êtes éclairés dans une vaste pièce obscure, vous ne verrez pas beaucoup mais vous serez très visibles pour ceux qui sont dans l’ombre. De la même manière, quand vous pensez à quelqu’un cette personne est placée sous le faisceau de votre attention qui l’éclaire et la rend visible. Le reste du temps, elle existe, mais est moins présente dans votre esprit en terme de conscience immédiate.
Cela implique t-il que cette personne disparaît totalement quand vous ne la pensez pas, quand vous n’en avez pas de représentation ?
Penser le non visible, l’espace dans lequel continue d’exister ce que nous ne pensons pas consciemment, l’admettre au moins, comme une possibilité, demande un effort de lâcher prise. Notre mental y résiste, notre conscience profonde y aspire. Sans ce lâcher prise, aucune vision globale n’est possible. De même, sans admission de notre part de la permanence de ceux qui nous ont précédés et qui sont morts, comme nous le serons, notre vision de l’humain, de ce qui le concerne, le définit, le nourrit, est incomplète.
Au cours des rêves nos défunts peuvent apparaître comme les vivants qu’ils étaient, comme les êtres conscients qu’ils sont devenus, et parfois comme les guides qu’ils peuvent être pour nous. Les voyages des âmes ne sont pas programmables. Nous ne pouvons que favoriser le rêve en restant ouverts, disponibles, à l’écoute, et sans préjuger de ce qui viendra à nous dans la nuit, à travers les ombres. Entre vivants et morts les aspirations essentielles sont les mêmes : régler le passé, accepter le présent, espérer dans l’avenir. Selon ce qui viendra avec le rêve nous pouvons entendre à quel niveau se fait l’échange, la demande. Dans tous les cas, prenons la responsabilité de ce qui vient par le sommeil entre nous et l’opacité de la nuit, et transformons le contact en conscience.
Merci de votre attention, faites de beaux rêves !
> Sur le même sujet, vous pouvez aussi lire ou relire : « Les rêves durant le deuil (1ère partie) »
Ce texte est magnifique… J’ai reçu toutes les nuances de son sens . Mais je ne prétends pas l’avoir compris entièrement. Comment peut-on faire un effort de lâcher –prise ?
Ce texte explique et répond à des tellement de questions que je me posais
Très beau texte et tellement vrai qui fait beaucoup de bien quand on a perdu des proches
Les rêves sont les réalités d’hiers ,permettant ainsi les voyage dans le temps,le temps ou nous étions ensembles ,ou tout était possible ,ou tout était vivant.
merci pour l’exposé
Je me pose des questions à mon sujet car depuis le départ de mon conjoint je ne reve pratiquement plus (je ne prends pas de médicaments).
Mon souhait le plus cher serait de le voir en reve . Meme si c’est une seule fois.
Depuis 4 ans il y a eu plusieurs décès : le père de mon compagnon, mon frère ainé, mon beau-frère puis mon compagnon. Jamais je n’ai révé d’eux .
Dans le texte on parle de voyage nocturne de la conscience. Concernant l’effort de lacher prise, notre mental y resiste, notre conscience profonde y aspire.
Puisque je ne reve d’aucun d’eux, cela veut il dire que je n’ai pas de conscience ou que mon mental est plus fort que ma conscience ?
Bonjour, Merci beaucoup pour votre aide. J’ai justement rêvé que nous nous étions retrouvé , mon défunt mari et moi même. C’était merveilleux. Mais c’était juste un rêve ou je peux espérer qu’il était vraiment près de moi ?
Chère amis. À ce jour cela fera 9 mois que mon conjoint est décédé et depuis je survis !!!! J’ai deux petites filles de 7 et 5 ans à m’occuper moi j’ai 35 ans et ma vie est en pause . Je ne rêve pas de mon mari cela me chocs car nous étions un couple très cool et intentionnée auprès de nos filles . Je suis complètement déconnecté est ce normal