Avec le premier pas sur le chemin du deuil, vient souvent celui du premier sur le chemin de retour au travail.
Un pied dans l’un, un pied dans l’autre, nous ne sommes ni tout à fait dans le premier, ni tout à fait dans le second et pourtant les deux sont face à nous avec leurs lots d’incertitudes.
Ainsi, le deuil apporte souvent un sentiment de solitude bien que lui, soit accompagné de nombreuses émotions (colère, déni, acceptation). Cette solitude est d’autant plus difficile qu’elle n’est pas corrélée avec le nombre de personnes qui nous entourent.
Les troubles qu’occasionnent un deuil ne sont pas toujours bien pris en compte et souvent négligés par notre société. Ainsi, le temps du deuil est rarement en adéquation avec un corps social de plus en plus impatient.
Il peut être très déroutant de croire en notre capacité à retrouver une vie « normale » avec ses collègues, là où cette notion de « norme » n’est plus synonyme de représentation de soi avec l’être cher perdu.
« Reprendre le travail après un deuil » est une formulation incorrecte de la situation.
Il s’agit plutôt de reprendre le travail pendant le deuil car celui-ci peut se mesurer en semaines, en mois, en années et il est rare que le deuil soit terminé avant de reprendre l’activité professionnelle. Néanmoins de nombreux bénéfices peuvent être tirés de ce retour au travail.
Mais comment créer un nouveau quotidien ? Comment vivre les premiers jours de retour à l’emploi ? Comment faire pareil qu’avant quand pour soi, tout est différent ?
En effet, il peut être difficile d’appréhender la reprise du travail.
L’appréhension du retour au travail réside pour de nombreuses personnes dans les idées reçues du regard des autres. Ces préjugés se manifestent naturellement dans des phrases pourtant pleines de bonnes intentions, parfois maladroites ou dans la simple émotion de nos interlocuteurs.
« Il faut oublier», « Le temps fera les choses », autant de phrases qui peuvent nous faire chavirer et raviver la douleur latente que l’on ressent déjà au quotidien.
Cette appréhension, qui peut être liée à la crainte de s’habituer à l’absence, peut aussi résider dans la peur de vivre de nouvelles choses. Elles ont un point commun : la peur de l’oubli.
Mais faire son deuil est au contraire la création d’un lien apaisé avec l’être cher.
Ainsi, retourner au travail à l’aube de son deuil peut éclairer le chemin.
Selon une étude du CREDOC sur les français et le deuil en 2019, 84% des français ont trouvé du réconfort dans leur deuil grâce à leurs collègues et 61% de la part de leur environnement professionnel au sens large.
Au-delà du réconfort et de la bienveillance témoignée par l’entourage professionnel, le retour à l’emploi permet également de développer une concentration qui peut accorder du repos au deuil lui-même.
Ne plus se concentrer uniquement sur son deuil mais également sur les choses et les personnes qui nous entourent permet de laisser au travail intérieur l’énergie nécessaire pour avancer car trouver des repères est essentiel à la construction.
Mais, bien que le retour au travail puisse être bénéfique pour la personne en deuil, des risques peuvent freiner le processus.
On ne le dira jamais assez, chaque deuil est singulier. Ainsi, les règles générales concernant les personnes en deuil peuvent ne pas s’appliquer à tous.
Le retour au travail pendant le deuil peut être porteur d’une importante remise en question.
De nombreux témoignages, dont certains sur notre forum, décrivent le caractère dérisoire que l’on peut attribuer à son travail lors du retour. La routine de ses tâches ou la nature même de son emploi peut sembler inutile et être extrapolée de telle sorte que l’envie de tout arrêter devienne imminente.
Il faut porter la plus grande attention à ces envies hâtives, les distinguer et les vivre avec précautions.
En effet, les émotions que l’on traverse pendant le deuil peuvent altérer notre perception et jouer un rôle néfaste sur l’avenir personnel et professionnel.
Si ces envies se font ressentir, il convient de prendre le temps de l’introspection et de comprendre ce qui, malgré la douleur, peut toujours participer à la vie.
Prendre soin de soi, dans tous les aspects de son quotidien, y compris professionnel est essentiel car la douleur n’est pas le seul lien que nous avons avec le défunt.
Et, pour que la relation intérieure apaisée avec l’être cher réside en soi, il faut faire de la place et trouver les ressources : en soi.